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Le studio et l'incubateur de start-up bruxellois E-Health Venture offrent un soutien aux start-ups qui se concentrent spécifiquement sur les thérapies numériques (DTx). Koen Kas est impliqué en tant que consultant en contenu et préside le comité d'experts pour cet appel à projets. Nous l’avons contacté pour connaître les attentes sur la thérapeutique numérique. Mais aussi pour savoir comment le secteur des soins de santé peut suivre cette tendance.
« La thérapeutique numérique (DTx) permet de délivrer des interventions médicales directement aux patients à l'aide de logiciels fondés sur des preuves et évalués cliniquement pour le traitement, la gestion et la prévention d'un large éventail de maladies et d'affections ». C'est la description utilisée par l'organisation à but non lucratif Digital Therapeutics Alliance.
L'une des personnes impliquées dans cette organisation est Koen Kas. Il est mondialement connu en tant que chercheur, auteur, fondateur de Healthskouts et professeur en oncologie moléculaire à l'université de Gand. K est aussi réputé pour être un observateur des tendances en matière de soins numériques et conservateurs de la base de données de toutes les applications de santé, DTx et logiciels médicaux disponibles dans le monde. « Le DTx n'est qu'un aspect du spectre des soins numériques. Il s'agit d'applications de soins numériques qui ont fait leurs preuves sur le plan clinique et qui peuvent être utilisées parallèlement aux outils de soins traditionnels. »
DTx Advance
Au vu de son expertise, c’est en toute logique qu’E-Health Venture s'est adressé à lui en tant que conseiller pour DTx Advance, le programme destiné aux jeunes entreprises lancé en décembre en collaboration avec IQVIA, Voka Health Community et les partenaires stratégiques Partenamut, Helan, Goed et Fonds Verhelst. Il s’agit d’un programme dédié aux start-up qui se concentrent sur la thérapeutique numérique. Il ne concerne pas seulement les développeurs d'applications, mais aussi ceux qui proposent des solutions via la réalité virtuelle, la réalité augmentée ou encore la blockchain.. Les projets sélectionnés bénéficieront d'un financement, d'un accompagnement, d'un soutien spécialisé et d'un accès à un réseau de partenaires. Il est notamment question des hôpitaux, des universités, des institutions financières, des régulateurs et des professionnels du monde des affaires. Il permet aux jeunes entreprises de lancer leur application DTx avec moins de risques et dans un délai plus court.
« Dans le programme précédent (OncoTech ed.), des start-ups de Belgique, de France, des Pays-Bas et d'Allemagne ont participé. Trois des trente applications ont réussi à survivre. Nous allons faire de même avec DTx Advance. J'espère que nous pourrons à nouveau enthousiasmer les start-ups étrangères. À terme, nous soutiendrons environ trois ou quatre projets », précise Koen Kas.
DTx sans certification
Le secteur de la santé se tourne notamment vers l'Allemagne en matière de thérapeutique numérique. Avec la procédure accélérée allemande DiGA, les applications de santé peuvent obtenir une approbation accélérée pour être remboursées en tant qu'applications sur ordonnance. Les médecins et les psychothérapeutes peuvent prescrire ces applications à leurs patients. Actuellement trente applications DTx sont concernées. Koen Kas explique que « l’Allemagne donne la tendance. Mais à part cela, ce sont les Français et nous, les Belges, à travers la pyramide de validation de la mHealth, qui ont le plus avancé dans le processus de remboursement du DTx »
Mais en réalité, il existe des réglementations pour faciliter le remboursement. Or, en Allemagne, la prise en charge ne signifie pas nécessairement que ces nouvelles thérapies numériques sont utilisées en masse. « Seuls 2% des médecins allemands prescrivent une application DTx approuvée. Cela signifie que les autres ne font délibérément pas à elles ou ne les connaissent pas. Il y a donc un problème, et c'est en partie dû à un souci de communication ou de marketing. »
Koen Kas conseille donc aux innovateurs de donner la priorité au marketing et à la commercialisation de l'application ou de l'intervention. « Il est parfois plus intéressant de commencer par le marketing, de prouver que votre solution suscite l'adhésion des patients et de n'envisager qu'ensuite la réglementation de l'application. » Pour résumer : ne vous laissez pas entraîner par la certification et l'approbation par le système de remboursement. Il s'agit d'un processus qui exige beaucoup d'une start-up, en termes de temps, de concentration et de ressources financières.
Les consommateurs sont prêts à payer
Il démontre régulièrement aux entreprises et aux professionnels de la santé que si une application mobile ou une thérapie est bonne, les personnes sont prêtes à payer sans que le produit soit remboursé. « Prenez une application qui traite les douleurs lombaires. Elle va contribuer à m’apprendre comment bouger et quelle posture est bonne. L'application coûte 100 euros par mois, par exemple, et après trois mois, elle produit le résultat escompté : vous êtes soulagé de votre mal de dos. J'ai des patients autour de moi qui se disent déjà “je suis heureux de dépenser 300 euros pour quelque chose qui fonctionne”. »
Le programme de DTx Advance va donc au-delà du simple processus consistant à obtenir le remboursement d'une application et à permettre aux médecins de la prescrire. « Imaginez qu'en tant que start-up, vous avez une application certifiée qui est à peine utilisée, comme c'est le cas en Allemagne actuellement. C'est un problème. Ensuite, j’explique aux fondateurs et aux innovateurs de me démontrer pour quelle raison les citoyens ou les patients veulent utiliser leur application. Car c’est bien ça qui compte. Ensuite, nous trouverons probablement un modèle économique pour continuer à le faire. »
Au-delà du système de la pilule
Le consultant de DTx Advance cite l'application Migraine Buddy comme autre exemple. Grâce à l'intelligence artificielle, l'application tente de déterminer la cause des migraines des utilisateurs. Différents facteurs sont cartographiés, tels que les caractéristiques personnelles, les habitudes de vie et les caractéristiques environnementales comme l'humidité et la pression atmosphérique. À partir de ces interactions, l'application détermine le moment où la crise de migraine est susceptible de se produire. « Si cent mille utilisateurs veulent l'utiliser. Cela suscitera l'intérêt, par exemple, d'une entreprise pharmaceutique. Migraine Buddy a signé un accord avec la société pharmaceutique suisse Novartis, sans avoir été certifié au préalable. Je pense qu'il s'agit là d'un bon exemple de la manière dont on peut procéder. »
Selon Koen Kas, en mettant l'accent sur la prévention des maladies, les prestataires de soins de santé peuvent travailler avec les patients pendant de plus longues périodes. « Vous voyez maintenant les entreprises pharmaceutiques penser au-delà de l’usage des médicaments. Ils sont parfois nécessaires, mais une thérapie numérique permet de rester beaucoup plus longtemps sur la piste du futur patient en proposant de nouveaux services plus préventifs. »
Plus d'attention portée sur le mode de vie
Koen Kas estime que les soins du futur ne seront pas seulement axés sur le traitement des patients, mais aussi sur la prévention des maladies. Un avenir dans lequel les patients sont conseillés à temps pour éviter de tomber malade.
« Prenez les patients atteints de maladies rénales, l'un des groupes de patients les plus coûteux dans le domaine des soins de santé. Ce problème de santé résulte souvent du diabète. Ces patients doivent être sous dialyse pendant quelques années, puis ils ont besoin d'un rein artificiel. En intervenant sur le mode de vie, nous pouvons commencer la prévention à un stade précoce. Les coûts sont moins élevés et la portée est très large. Sur les cent euros dépensés en soins de santé dans le monde, environ quatre-vingt-dix euros sont consacrés aux deux dernières années de la vie du patient. Moins de deux euros vont à la prévention. C'est comme ne jamais laisser une voiture faire un check-up et attendre qu'elle ne fonctionne plus. »
En tant qu'expert en santé numérique, Koen Kas participe également à une initiative des hôpitaux belges, qui réfléchissent actuellement à comment ils peuvent aider les patients à ne pas tomber malades. « C'était inenvisageable il y a deux ans, mais aujourd'hui, les soins de santé en Belgique réfléchissent à ce modèle économique », déclare le consultant de DTx Advance.
Récompenser la prévention des maladies
Mais dans quelle mesure est-il réaliste pour les patients de commencer des interventions sur leur mode de vie des décennies à l'avance, afin de prévenir une éventuelle maladie ? « C'est très difficile, mais il existe diverses initiatives qui semblent fonctionner. Pensez aux premiers exemples de système de récompense des consommateurs. En Russie et au Mexique, les voyageurs peuvent gagner un ticket de métro gratuit en faisant des squats dans la station de métro, afin de prévenir l'obésité. À Dubaï, je reçois 1 gramme d'or si je perds quelques kilos. Singapour est en train de mettre en place une application visant à maintenir sa population en bonne santé en jouant et en la récompensant pour cela. Ils sont payés, en quelque sorte, pour bouger. »
« Ainsi, même les jeunes sont confrontés au fait qu'une vie saine présente un certain nombre d'avantages pour plus tard. À savoir être en bonne santé plus longtemps. La prévention n'est pas facile, mais si elle me permet d'apprendre de nouvelles choses et d'acquérir de nouvelles expériences, alors elle est parfaitement commercialisable. Et les thérapeutiques numériques s'y prêtent parfaitement. »
En savoir plus sur les thérapies numériques et le programme DTx Advance.
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