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Smarthealth et in4care ont récemment organisé The State of Digital Therapeutics 2021, un nouveau séminaire sur l’innovation des soins de santé aux Pays-Bas. Un évènement important au vu de l’évolution des thérapies numériques (DTx) qui prennent de plus en plus d’ampleur dans les secteurs médicaux du monde entier. Aux Pays-Bas autant qu’en Belgique, les gouvernements, les assureurs et les autres parties impliquées cherchent des solutions pour lever les blocages financiers. Ils souhaitent également répondre positivement aux nouvelles demandes de développement. Que pouvons-nous apprendre des experts, entrepreneurs et décideurs politiques réunis à Anderlecht ?
Le label DTx couvre désormais un large spectre de solutions thérapeutiques d’e-santé pour le suivi, le traitement et la prévention des troubles. C'est un constat unanime que nous pouvons tous faire aujourd’hui. D’ailleurs, certains outils apportent des alternatives plus efficaces que les traitements actuels. En effet, les thérapies numériques vont plus loin que les applications prescrites par les médecins. D'autres solutions numériques telles que les wearables, les lunettes de réalité virtuelle ou les jeux offrent également de plus en plus une valeur thérapeutique fondée sur des preuves. Cependant, il reste logique qu'une application soit au cœur de la communication avec l'utilisateur.
La houleuse question du financement des DTx
Marius Declerck, COO chez eHealth Venture, a dès le départ précisé une notion cruciale. La définition de DTx est indépendante de la question de leurs financements ou de leurs remboursements. Un point pourtant important en Allemagne avec le régime DIGA et en Flandre avec la pyramide mHealth mis en place par le gouvernement.
Autre point rapidement mis au clair : les applications DTx peuvent être autonomes, tout comme s’inscrire dans un processus de soins. C’est notamment le cas pour les outils développés pour traiter les troubles anxieux qui peuvent se suivre indépendamment, ou en complément d’un traitement. Mais quel que soit le cas de figure, la validation clinique et les preuves scientifiques d'un bon fonctionnement restent cruciales.
« Réinventer la roue limite la progression des DTx »
Daan Dohmen, le fondateur de la société néerlandaise Luscii, a partagé l'approche adoptée par son entreprise. Les applications de surveillance à domicile développées par la start-up sont utilisées dans des dizaines d'hôpitaux de sept pays différents. Luscii fournit une infrastructure et une plate-forme qui permet aux développeurs (souvent des médecins et des infirmières d'hôpitaux) de créer des applications sur mesure de suivi à distance. Par exemple pour monitorer la convalescence d’un patient souffrant d’un COVID long, de problèmes orthopédiques ou encore pour accompagner une personne en ménopause. Selon son expertise, la co-création et la priorité accordée au patient sont indispensables pour le DTx. Néanmoins, il précise que si chaque hôpital commence à réinventer la roue elle-même, vous manquez l'échelle pour vraiment progresser.
Les solutions dtx : la prochaine étape pour des soins personnalisés ?
Pour Hadewig de Corte, CEO de la Clinique Saint-Jean de Brussels, nul doute que les thérapies numériques vont jouer un rôle crucial dans l'offre de soins de son hôpital. Selon elle, ils sont l'un des moteurs les plus importants pour améliorer l'expérience du patient. Un fer de lance de la stratégie dans laquelle les malades sont au centre de tous les processus de traitement. Les innovations numériques permettent de mettre en avant le point de vue et le caractère unique des 30 000 personnes qui visitent la Clinique Saint-Jean chaque année. Elle considère l'expérience DTx comme une continuation nécessaire et logique dans l'histoire des avancées médicales.
Les enjeux d’un marché très réglementé
En Belgique et aux Pays-Bas, des dizaines de startups DTx élaborent une application fonctionnelle avec un modèle de revenus durable. C’est notamment le choix de Door Vonk, le co-fondateur et directeur commercial de Tired of Cancer. L’entreprise travaille depuis des années avec une application DTx qui aujourd’hui a fait ses preuves pour lutter contre la fatigue liée au cancer. C'est un problème majeur pour les malades. Et l’outil mis en place joue un impact significatif sur la qualité de vie des patients. À tel point, que l’application est désormais disponible en plusieurs langues. Elle est même recommandée et remboursée dans plusieurs pays.
Door Vonk est conscient des enjeux d’une telle application. Respecter les directives et les normes dans des pays comme le Royaume-Uni, l'Allemagne et les États-Unis est une partie coûteuse et exigeante en main-d'œuvre. Même pour un seul pays, comme l'Allemagne. Considéré comme le « pays guide » européen, il faut non seulement une expertise scientifique, mais aussi une connaissance approfondie de l'organisation des soins du territoire. De tels processus pèsent sur le budget et l'attention de la direction d'une startup DTx. Cela impact forcément les priorités en matière de développement de logiciels, de marketing et de ventes. Et sans une bonne équipe avec des compétences avérées, il sera très difficile d’aller au bout d’un projet.
Les DTX doivent satisfaire pleinement les patients
Le co-fondateur de Tired of Cancer a aussi souligné un autre aspect à ne pas négliger : les modèles de revenus. Il s’appuie sur sa propre expérience avec son application qui fonctionne désormais sur un modèle de remboursement optimisé pour chaque segment du marché. Il a donc dû considérer l’ensemble des prestataires de soins : les hôpitaux ou les établissements médicaux, les employeurs ou encore les assureurs.
« C’est un step inévitable. Cependant, cela ne signifie pas que vous vous implanterez plus vite. Même si vous êtes admissible à un remboursement auprès d'un assureur ou d'un gouvernement après un processus fastidieux, rien ne vous garantit que les médecins prescriront votre application. Vous devrez donc vous faire connaître. Cela signifie participer à des congrès, des conférences ou encore contacter des revues professionnelles et des organisations de médecins. Vous devez vous servir de toutes les ressources marketing et réseaux sociaux que vous pouvez exploiter. Et rien de tout cela n'a de sens si votre cœur de cible, le patient, n'est pas 100 % satisfait de votre application. Son appréciation doit rester votre priorité. Car finalement, c'est de son contentement que tout commence et se termine », explique Door Vonk.
Le remboursement n’est qu’un point de départ
Le professeur et Docteur Koen Kas, expert numérique et entrepreneur en sciences de la vie, a également brisé un mythe. Il affirme que l'éligibilité au remboursement ne devrait pas être perçue comme le Saint Graal pour les entreprises DTx. Pour lui, il ne s’agit que d’un point de départ. Il pointe à nouveau du doigt l'Allemagne, où les applications qui répondent aux exigences de la DIGA peuvent être prescrites et remboursées pendant un an. Pourtant, seuls 2 % des médecins allemands les recommandent à leurs patients.
Et même si nous pouvons nous attendre à une augmentation de ce pourcentage, les startups devront faire face à une concurrence mutuelle notamment au niveau de l’offre et des prix. Ainsi, « si votre marketing et vos ventes ne sont pas en ordre, vous n’avez aucun avantage à obtenir une compensation officielle si vous n'êtes pas prescrit », souligne-t-il. Avant d’ajouter « ne sous-estimez pas les consommateurs. Ils sont de plus en plus disposés à payer eux-mêmes pour des applications de soins de santé. »
Les DTx devront être pensées à l’échelle internationale
Enfin le Docteur Koen Kas a abordé les marchés nationaux caractéristiques en Europe. Et d’après son analyse, aucun chevauchement n’existe entre les dizaines d'applications belges qui fonctionnent sur le remboursement et les 24 applications approuvées en Allemagne. Il précise que l’augmentation d'échelle est inévitable. Ainsi, très vite les applications DTx devront se concentrer sur plusieurs pays. Si la connaissance locale d'un fournisseur national est un plus, les grands fournisseurs internationaux auront toutefois, quoi qu’il arrive, un avantage d'échelle.
Un constat unanime : l’évolution ne fait que commencer
La conclusion la plus partagée était qu'un événement de connaissances comme The state of Digital Therapeutics aurait été bien différent un an et demi auparavant. Les évolutions sont désormais très rapides. Les gouvernements se réunissent au niveau européen. Le capital-risque est très important. Les grandes sociétés pharmaceutiques se joignent en masse quant aux consommateurs, ils s'habituent de plus en plus aux soins numériques. L'édition 2022 brossera sans doute un tableau très différent. Rendez-vous l’année prochaine !
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