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Cet été, Smarthealth met à l'honneur dix start-ups médicales novatrices néerlandaises et belges. Celles qui font entrer les soins de santé dans le 21e siècle ! Et notre attention s’est arrêtée sur l'application Gevoelsthermometer qui vise à améliorer le bien-être mental de la population.
Il faut le faire : monter sa propre entreprise en pleine crise sanitaire. C'est pourtant le pari fou que se sont lancé Steven Vints et Philip Willems en faisant leur début dans le monde de l'entrepreneuriat. Pourtant, leurs premiers pas ne sont pas un hasard, confit l'entrepreneur Philip Willems lors d'une visioconférence. Il a lui-même plus de trente ans d'expérience dans le secteur de la santé et il est également coach auprès de personnes autistes depuis plus de dix ans. Il nous explique que « les compétences de son partenaire et les siennes sont complémentaires. Steven est un expert de l'informatique, il gère donc la partie technique de l'entreprise. De mon côté, j’ai également un large parcours. J’ai de nombreuses années de pratique dans le milieu médical. »
Un problème sociétal
Cela fait des années que Philip Willems a remarqué un problème sociétal, un mal-être global qui ne cesse d’augmenter. Il évoque notamment les burn-out et les dépressions qui ont cessé d'être des phénomènes isolés depuis longtemps. Et ce n’est pas la pandémie du coronavirus qui a ralenti cette tendance. « À un certain moment, les personnes ont dû faire face à une explosion d’émotions qui s’est directement répercutée sur leur bien-être mental », explique-t-il. Il s’est donc penché sur la question et a cherché une solution pour mieux repérer et analyser les éléments déclencheurs. « Il existe de nombreux journaux de bord et diverses méthodes pour noter vos émotions, mais finalement peu de personnes y ont recours. Pourtant, elles peuvent réellement aider à mettre le doigt sur ce qui peut induire une dépression. Nous avons donc revisité le format en le rendant plus accessible et facile d’utilisation. Le gros avantage d’une application, c’est que vous pouvez stocker des informations à tout moment et n'importe où. Même si vous êtes hors ligne, vous pouvez toujours garder une trace de tout. »
Développer un outil digital semblait donc être un produit plus approprié. « Nous voulons surtout être très accessibles. Et quoi de plus facile que d'installer gratuitement une application sur votre téléphone ? D’ailleurs, quoi qu’il arrive, nous ne voulons pas la rendre payante. Cela serait un frein trop important pour les utilisateurs », précise l’entrepreneur.
Outre l’exploitation des données par ses utilisateurs, un prestataire de soins peut également en tirer des informations précieuses. À travers un tableau de bord disponible en ligne, il a accès au thermomètre émotif de ses patients. « Grâce à notre application, un psychologue ou un coach par exemple, peut suivre de près les progrès des malades ». Lui-même dans son exercice se sert de cet outil digital : « Je remarque que je peux suivre avec plus de précision et beaucoup plus rapidement mes patients. Avant le début d’une consultation, je peux, en principe, déjà lire les enregistrements et j’ai instantanément une vision globale de son état mental. »
À l’origine : une version papier
L'idée de Gevoelsthermometer a d'abord été élaborée en version manuscrite, explique Philip Willems. « Concrétiser notre idée a pris beaucoup de temps. Avec mon expérience de coach, à l’origine nous avions en tête une sorte de carnet, sur lequel vous pourriez noter vos ressentis et en parler plus tard avec une personne qualifiée. Si nous avons vu que notre méthode fonctionnait, nous nous sommes aperçus que la montagne de papier qu’elle nécessitait n’était pas pratique. Le problème majeur était la longue analyse qu’elle nécessitait : les personnes devaient apporter leurs écrits durant leur séance afin que le professionnel de santé puisse les analyser sur place. Une étape qui prenait beaucoup trop de temps. »
Comment évoluer en pleine pandémie ?
La version initiale est finalement passée au numérique en mai 2020. « Lorsque nous avons effectué ce changement, nous étions en pleine crise pandémique. À l'époque, nous pensions que cela allait causer notre perte, mais heureusement, ça n’a pas été le cas. Notre choix de passer tout en ligne était plus qu’une évidence, c’était une nécessité absolue ! Nous sommes constamment connectés, y compris les professionnels de santé : ils n’ont pas besoin de se déplacer pour rencontrer des patients. Ainsi, avec le système numérique que nous avons actuellement, les coachs ou les psychiatres n'ont pas à parcourir la moitié ou la totalité des pages A4 lors d'une séance. De plus, selon la licence dont dispose le professionnel de soins, il peut également converser à distance avec le patient pour répondre à ses demandes plus rapidement. »
Bien que Steven Vints et Philip Willems soient sortis de la phase de démarrage depuis un certain temps, ils continuent de se battre pour nouer des collaborations avec des partenaires plus importants. « Nous avons à présent une base assez conséquente avec laquelle collaborer. Nous sommes d’ailleurs déjà en pourparlers avec un certain nombre de grandes organisations qui voudront peut-être soutenir notre produit, mais cela prendra un certain temps avant d’aboutir. De plus, nous souhaitons également améliorer continuellement notre application. Nous prenons en considération les feedbacks des personnes qui l'utilisent. En fonction de leurs commentaires, nous faisons des ajustements afin d’avoir une application encore plus conviviale et pratique. Certaines améliorations sont déjà prêtes pour un développement ultérieur, mais bien sûr, nous écoutons en priorité les attentes des consommateurs et déterminons ainsi la séquence des futurs développements. »
Cet obstacle imprévu
Si l'entreprise a démarré sur les chapeaux de roues, il lui reste encore plusieurs défis à relever. « De nombreuses personnes se sont immédiatement impliquées dans notre projet et dès le départ elles ont cru en ce que nous voulions faire. Ce soutien et cet enthousiasme fut très positifs », raconte l’entrepreneur. Néanmoins, les fondateurs de Gevoelsthermometer n’avaient pas pris en considération un détail essentiel : la lourdeur du système de soins belges : « Les soins de santé en Belgique sont très lents et il est difficile de les faire évoluer avec les changements de notre époque. Le paysage doit d'abord être en mouvement avant que nous puissions y ajouter notre produit. Avec la crise sanitaire actuelle, de nombreux établissements de santé ont dû revoir leur organisation, notre produit n’était pas forcément une de leurs priorités.»
De plus, Philip Willems précise que « parfois, vous avez d'abord et avant tout besoin de plus d'énergie et de temps pour contacter le bon interlocuteur. « Quelques mois auparavant, nous discutions avec une organisation qui était très enthousiaste à propos de notre projet, mais qui n’a pas donné suite. Ce scénario est fréquent et à chaque fois vous recommencez à zéro et vous devez tout reprendre en espérant que le prochain contact sera le bon ! »
Trouver son cœur de cible
Autre point important : cibler les bonnes personnes. Au départ, le groupe visé était très large : « jeune ou vieux », tout le monde devait y avoir accès. Avec un peu de recul, les fondateurs se sont rendu compte que leur cible était trop vaste. Ainsi, ils ont décidé de le réduire aux patients autistes ou qui luttent avec leur bien-être mental. « L’idée n’est bien entendu pas de proposer une offre limitée, mais de mieux cibler pour se développer. Nous avons déjà reçu des questions de personnes du milieu sportif et de psychologues qui travaillent avec des patients en burn-out. »
Faciliter l'accès aux soins
Avec l'introduction de l'application, les fondateurs espèrent que les utilisateurs chercheront l'aide dont ils ont besoin avant qu’il ne soit trop tard auprès d’un professionnel de santé. « Le pas à faire pour trouver un soutien est encore bien trop grand », témoigne le coach. « Toute ma carrière, j'ai entendu dire que les délais d'attente en santé mentale sont beaucoup trop longs et que cela ne s’améliore pas. Beaucoup de personnes luttent avec leurs sentiments et ne reçoivent jamais les soins qu'ils devraient recevoir. Nous souhaitons les aider et remédier à ce problème. »
Pour réduire le clivage entre l'utilisateur de l'application et le psychologue, Philip Willems envisage de mettre en place une notification contextuelle sur l'application lorsque des sentiments négatifs sont enregistrés en permanence. « J'espère que de cette façon, nous pourrons réduire un peu la difficulté d’accès à une personne qualifiée. Si vous avez constamment des idées noires et que vous recevez le message qu'il existe des psychologues professionnels dans votre région qui peuvent vous apprendre à les gérer, cela peut avoir un impact énorme sur votre bien-être mental. »
Bientôt une application internationale ?
Bien que le projet s'étoffe petit à petit, le coach ose rêver tout haut. « Ce serait formidable si nous pouvions jouir d'une notoriété encore plus grande dans le paysage européen actuel. Aux Pays-Bas, par exemple, nous avons déjà beaucoup de contacts, mais ce n’est pas toujours évident de joindre les bonnes personnes.» Néanmoins, d’autres pays semblent être intéressés par la start-up belge. « Nous avons également un lien avec le Portugal. Une ouverture intéressante et facile à construire puisque vous pouvez parfaitement traduire notre application en anglais pour la distribuer également à l'étranger. Des pistes à explorer ! Quoi qu’il en soit, si nous arrivons à aider une ou deux personnes via notre application, c’est déjà une très belle victoire pour nous ! »
Découvrez notre série de l'été sur les start-ups médicales néerlandaises et belges innovantes. Quels concepts révolutionnaires d'e-santé seront bientôt disponible dans les années à venir ? Lisez tous nos articles ici.
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