Les trackers de sommeil sont tendance, mais que mesurent-ils réellement?

Peut-on aussi superviser son sommeil avec un tracker d'activité? Et dans quelle mesure la fonction de suivi du sommeil fonctionne-t-elle réellement ? SmartHealth se penche sur le monitoring du sommeil: comment et pourquoi monitorons-nous notre sommeil ?

Vous cherchez à en savoir plus sur votre rythme de sommeil ? Ou un moyen d'améliorer celui-ci ? Alors vous pouvez vous procurer pour 112 € un tracker de sommeil Beddit. Ne passez pas une nuit dans une clinique du sommeil avec un bonnet de bain plein de capteurs sur la tête, mais gardez plutôt un œil sur votre rythme de sommeil dans votre propre lit. Mais que disent vraiment ces mesures à domicile sur la qualité du sommeil ? Un capteur de ce type peut-il vous renseigner sur les cycles de sommeil, l'activité cérébrale et la fréquence cardiaque au repos? Les avis des experts divergent.

L'idée que vous puissiez monitorer votre sommeil aussi facilement que votre fréquence cardiaque ou le nombre de pas que vous faites est une promesse qui stimule l'imagination. Les fabricants d'applications vous promettent un laboratoire du sommeil complet pour 0,99 centimes. Toutes sortes de fabricants de matériel et de logiciels se sont donc lancés sur ce marché. Les fournisseurs de trackers d'activité comme Fitbit, Polar et Jawbone par exemple, affirment que leurs bracelets peuvent vous renseigner sur la qualité de votre sommeil. Les fabricants d'applications vous promettent un laboratoire de sommeil complet dans votre propre lit pour 0,99 centimes. Dans le même temps, une toute nouvelle génération de trackers de sommeil spécifiques est prête à arriver sur le marché. Cet été, Withings lance Aura, Melon, le bracelet financé par crowdfunding du groupe EGG devrait sortir bientôt et la startup Hello a levé plus d'un million de dollars de financement pour son tracker de sommeil Sense.

Pourquoi vouloir mesurer la qualité de votre sommeil?

La plupart d'entre nous savent que le sommeil, ou son absence, a un impact majeur sur notre santé. Notre corps récupère pendant le sommeil et produit des hormones de croissance. Et le cerveau se débarrasse également des déchets durant cette période.

Pourtant, il semble que de nombreuses personnes n'obtiennent pas la quantité de sommeil recommandée. Au Pays-Bas, une nuit de sommeil moyenne compte 7 heures, mais selon les recherches, notre besoin de sommeil de base est plutôt de 7,5 à 8,5 heures. ‘’Cela signifie qu'il suffit d’un rien - une période chargée au travail, la naissance d'un enfant ou beaucoup de stress - pour être non seulement un peu, mais bien en deçà de ce besoin de base. Et c’est là qu’on se retrouve dans la zone de danger’’, explique le psychophysiologiste et spécialiste du sommeil Gerard Kerkhof.

Withings lance le moniteur du sommeil Aura cet été

Dormir mal ou trop peu peut entraîner des problèmes de santé (parfois graves). Bien qu'il existe diverses théories à ce sujet, il a en tout cas été démontré qu'une privation de sommeil - en particulier sur le long terme - entraîne un risque plus élevé de maladies cardiovasculaires, de diabète de type 2 et de troubles du système immunitaire. L'équilibre hormonal devient confus, entraînant un stockage excessif des graisses. À court terme, une mauvaise nuit de sommeil provoque non seulement une irritabilité exacerbée, mais les personnes concernées sont également moins alertes, leur capacité de performance diminue et ils présentent un comportement à risque (dans les décisions compliquées, les gens prennent les risques moins au sérieux et les effets positifs sont surévalués).

Troubles du sommeil

Bien sûr, il arrive à tout le monde de parfois dormir un peu moins. En raison du stress, d’un verre de trop, de moustiques dans la chambre ou d’un partenaire de sommeil agité. Mais il y a aussi pas mal de gens qui passent très souvent de mauvaises nuits, trop courtes ou trop agitées. Le stress ou la tension jouent un rôle majeur, mais il se peut aussi que ces personnes souffrent d'un trouble du sommeil. Il existe six grands groupes de troubles du sommeil, notamment l'insomnie, le syndrome d'apnée obstructive du sommeil (y compris l'apnée du sommeil survenant plus de 15 fois par heure), le syndrome des jambes sans repos (y compris les jambes agitées et qui démangent) et la narcolepsie (s'endormir pendant la journée). Bien sûr, il arrive à tout le monde de parfois dormir un peu moins

Les plaintes qui pointent vers l'un de ces troubles - par exemple vous réveiller brusquement le matin alors que vous avez l'impression d'avoir eu une bonne nuit de sommeil - peuvent constituer une raison valable de monitorer votre sommeil durant l’espace d’une nuit.

Avant l'essor des moniteurs de sommeil à domicile, vous êtiez dirigé vers l'une des vingt cliniques du sommeil des Pays-Bas. Où l’on vous couvre d'électrodes qui mesurent l'activité cérébrale, et généralement aussi l'activité musculaire, la fréquence cardiaque ou les mouvements oculaires. Une mesure du sommeil prend généralement 24 ou 48 heures. Une mesure ne se fait donc pas que la nuit, l'activité cérébrale est également enregistrée le lendemain. Une telle étude du sommeil ( polysomnographie , PSG en abrégé) dans une clinique du sommeil est principalement réalisée pour diagnostiquer toute cause neurologique (par exemple la narcolepsie) ou toute autre cause médicale (comme l'apnée du sommeil).

Monitoring professionnel du sommeil, photo via www.ambu.com

Bien qu'une seule mesure puisse suffire pour identifier un tel problème, certains experts estiment qu'une mesure ponctuelle est quelque peu limitée. La neurologue pédiatrique Sigrid Pillen, qui travaille au Kempenhaeghe Center for Sleep Medicine: ‘’Bien sûr, nous ne voyons qu'un instantané lors d'une mesure. Le sommeil d'une personne peut différer d'une semaine à l'autre et il arrive assez souvent que quelqu'un qui passe une nuit chez nous ne soit justement pas perturbé par ses problèmes habituels cette nuit-là.’’

Selon Martijn de Groot, biologiste médical et responsable du programme du Dutch Quantified Self Institute, le fait de ne pas dormir dans des conditions naturelles dans un centre de sommeil est également un inconvénient. "Vous portez un bonnet de bain avec environ 30 électrodes et un faisceau de câbles sur la tête."

La montée en puissance des trackers de sommeil à domicile

Ces dernières années, des alternatives sont devenues disponibles pour remplacer une nuit en clinique du sommeil. La société américaine ZEO a été l'un des premiers fournisseurs d'un produit de grande consommation. Leur bandeau de sommeil éponyme ZEO était une version simplifiée du moniteur utilisé par les centres de sommeil. Pendant le sommeil, les utilisateurs portaient le bandeau sur la tête avec un capteur contre le front. Tandis que leur activité cérébrale était enregistrée et rendue visible dans une application ZEO correspondante. Mais ZEO a fait faillite en 2013. Le marché n'était apparemment pas encore prêt pour le produit.

Bien que le modèle ZEO ne soit plus disponible, de nouveaux produits destinés à monitorer notre sommeil arrivent chaque mois sur le marché. Le Beddit, par exemple, un capteur que vous placez sous votre drap-housse et qui mesure les mouvements, la fréquence cardiaque et la fréquence respiratoire pendant la nuit.

Monitoring du sommeil Beddit

‘’Je considère les développements technologiques qui permettent d'enregistrer plus longtemps mais aussi davantage la façon dont vous dormez chez vous comme une évolution positive’’, déclare Sigrid Pillen. "Surtout si vous pouvez en tirer de bonnes informations." La physiothérapeute et experte du sommeil Cristina Sonnevelt-Weenink utilise également les possibilités offertes par les trackers et les applications du sommeil dans son travail. ‘’Vous pouvez obtenir des informations utiles en dormant avec un tracker au poignet. De telles informations peuvent vous aider si vous essayez de changer un certain modèle, comme vous coucher tard par habitude. Si vous disposez d’un aperçu de votre nombre d'heures de sommeil par semaine grâce à une application, cela peut vous ouvrir les yeux.’’

Ce point de vue est également pour Martijn de Groot, adepte de la méthode à domicile, l'une des principales motivations pour monitorer son sommeil. ‘’J'ai toujours pensé que je pouvais compenser le manque de sommeil que j'avais accumulé pendant la semaine le week-end. Cependant, en mesurant mon sommeil, j'ai découvert que c'était le contraire : je dormais encore moins le week-end. Je me couchais plus tard en ayant souvent bu un verre, ce qui rendait mon sommeil agité, et j’étais aussi réveillé plus tôt par mes jeunes enfants. Grâce à ces connaissances, j'ai adapté mon comportement de sommeil : je ne m’illusionne plus sur le fait de compenser mon manque de sommeil pendant le week-end et je me couche au moins une demi-heure plus tôt pendant la semaine.

Cercle vicieux

Le psychophysiologiste Kerkhof est moins optimiste quant au monitoring de votre sommeil. Il pense que de simples bracelets à votre poignet ou une application à côté de votre oreiller n’ont techniquement rien à voir avec les mesures prises dans un centre du sommeil. "Ce ne sont que des capteurs de mouvement et vous ne pouvez absolument pas en déduire la structure de sommeil d’un individu." Le tracker de sommeil Beddit mentionné plus haut trouve un tout petit peu plus grâce à ses yeux. ‘’Vous pouvez dans une certaine mesure déterminer à partir du rythme cardiaque ou de la respiration si quelqu'un a vraiment dormi profondément et paisiblement ou non. Mais j'insiste : ce n'est qu'un dérivé de l'activité cérébrale. Ce n'est qu'en mesurant l'activité cérébrale d'une personne - avec un bandeau ou des électrodes spécialement conçus pour cela - que vous pouvez réellement poser un diagnostic sur les cycles et les troubles du sommeil.’’, confie Kerkhof.

Kerkhof avance également un contre-argument psychologique : fournir à quelqu’un un aperçu de son sommeil - en particulier quelqu'un qui a (pas encore) des problèmes de sommeil - peut entraîner de l’anxiété (inutile). ‘’Tout le monde se réveille plusieurs fois pendant la nuit, ce qui est tout à fait normal. Mais si ils ne le savent pas d’eux-mêmes et qu'une application comme celle-ci leur révèle brutalement, les gens peuvent être impressionnés. Et ensuite commencer à s'inquiéter, ce qui constitue la première cause d'insomnie. Cela crée donc un cercle vicieux."

Sigrid Pillen acquiesce à cette explication. ‘’Dans un certain nombre de cas, nous recevons des personnes qui viennent pour un test approfondi sur la base de leur propre mesure via un trackerr ou une application, car elles sont inquiètes. Après quoi il leur est démontré que leur sommeil ne présente rien d’anormal et qu’elles sont uniquement fatiguées parce qu’elles en font trop. L’adage ‘’Si cela n'aide pas, cela ne fait pas de mal non plus’’ n'est donc pas entièrement vrai ici. La question est de savoir si vous dormirez mieux grâce aux trackers de sommeil. Le sommeil est quelque chose qui vous submerge, vous ne pouvez pas appuyer sur un bouton et vous endormir. Nous remarquons également que plus les gens sont préoccupés par leur sommeil et s'inquiètent ou y pensent, plus ils dorment mal.’’

Comment mesurer la qualité du sommeil ?

Pour l'expert du sommeil Kerkhof, il est particulièrement important que les personnes qui soupçonnent avoir un problème de sommeil ne laissent pas les trackers ou les applications les empêcher de demander de l'aide. "Supposer sans avoir les connaissances nécessaires que l'on peut s'aider soi-même est une bêtise." Sonnevelt-Weenink abonde dans ce sens. "Tout dépend si les gens ont une bonne notion des possibilités d’un moniteur ou s'ils sont dans la débrouille et tirent leurs propres conclusions. Vous pouvez plus ou moins voir quand vous vous endormez, mais je ne peux pas imaginer qu'un profane puisse vraiment influencer la qualité de son sommeil à partir d'un tel diagramme issu d’une application."

La caractéristique fondamentale de la qualité du sommeil est essentiellement le nombre d'heures de sommeil. Mais il y a plus que cela. Selon Kerkhof, il existe un certain nombre de directives, pas très absolues, pour examiner la qualité du sommeil. ‘’Si vous regardez les cycles de sommeil, au nombre de 3 à 4 par nuit chez tout le monde, vous savez qu’au cours d’une phase de sommeil normale, une personne doit être en sommeil profond pendant 20% du temps et environ 25% du temps en sommeil paradoxal. Cette période de sommeil profond devrait également être une période non perturbée de sommeil profond, par exemple au moins une demi-heure sans se réveiller entre les deux. Sinon c’est au détriment de la qualité du sommeil."

Cependant, selon Pillen, le sommeil profond n'est pas nécessairement un indicateur de qualité. "Certaines personnes ont peu de sommeil profond et sont néanmoins bien reposées pendant la journée." Le nombre de fois qu'une personne se réveille pendant une nuit peut également être une indication, mais selon Pillen, ce n'est pas non plus un facteur figé. ‘’Vous avez des gens qui se réveillent vingt fois par nuit et qui se sentent bien le lendemain, et vous avez des gens qui ne se réveillent que trois fois par nuit et se réveillent fatigués. Il n'y a pas de critères fixes pour une bonne ou une mauvaise nuit de sommeil, il y a trop de variations entre les personnes pour cela."

Marché croissant des trackers de sommeil

En résumé, même les experts ne s'accordent pas sur la façon de mesurer la qualité du sommeil. Il est donc peu probable que vous puissiez lire cette qualité à partir d'une application après une nuit de sommeil. Surtout lorsque cette application ou ce tracker ne monitore que vos mouvements pendant la nuit.

Néanmoins, il existe également des experts passionnés par les nouveaux trackers de sommeil qui monitorent aussi votre fréquence cardiaque et votre respiration. En cas de véritables problèmes, vous devrez toujours consulter un spécialiste, mais vous aurez au moins un aperçu de votre privation de sommeil.

Une chose est sûre. De plus en plus de parties se battent pour une place sur le marché des mesures à domicile. Ces entreprises ont dans leurs poches des dizaines de millions d'euros d'investisseurs. Cela conduira automatiquement à une qualité de plus en plus élevée des trackers de sommeil.

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